À la mémoire des fantômes de la route

Shanti Larochelle, employée de bureau à la FEESP, est une véritable mordue du vélo. Elle enfourche le sien quotidiennement pour se déplacer au 1601 de Lorimier, en été comme en hiver.

C’est cette passion pour le cyclisme utilitaire qui l’a poussée à assister aux cérémonies de vélos blancs organisées par Souliers et vélos fantômes Québec (SVFQ), un collectif qui installe depuis plus de dix ans des mémoriaux à la mémoire de cyclistes et piétons tués dans des collisions routières.

« Ça m’interpellait beaucoup, » nous explique-t-elle. « Je voyais une femme comme Mathilde Blais et je me disais “On a plus ou moins le même le même âge, elle aussi se déplaçait pour aller au travail. C’est vraiment tragique de finir comme ça. Je les vois les dangers pendant mon trajet, et moi aussi ça pourrait m’arriver.” »

Quelques années après l’installation du vélo fantôme de Mathilde Blais, une cycliste de 33 ans tuée par un camionneur sur la rue St-Denis à Montréal, des membres de SVFQ ont approché Shanti pour lui demander de devenir une des porte-paroles du collectif.

Shanti, qui se décrit pourtant comme une personne discrète et timide, a répondu positivement à la demande, malgré ses appréhensions.

« Ça fait 17 ans que je roule à vélo chaque jour. Mes trois enfants se déplacent aussi sur deux roues. Finalement, tout le monde dans ma famille, sauf mon chum, pédalent pour faire ses déplacements quotidiens. Savoir que je pouvais aider les familles endeuillées tout en militant pour de meilleurs aménagements urbains : c’est ça qui m’a donné le goût  d’accepter. Je voulais l’essayer et sortir de ma zone de confort, même si je voyais ça comme vraiment gros comme saut. Je suis pas mal plus à l’aise sur mon vélo que devant un micro et une foule. »

Sa première prise de parole pour le collectif s’inscrivait en 2021 dans le cadre d’une cérémonie pour retirer le vélo de Mathilde Blais. Après l’installation du Réseau express vélo (REV) sur la rue St-Denis, la famille de Mathilde concluait que l’aménagement avait changé de façon suffisante afin que la collision qui leur a couté la vie de leur fille ne se reproduise plus. Ce vélo est maintenant exposé au Musée de la civilisation à Québec.

Shanti a depuis aidé à l’organisation de plus de quinze cérémonies pour ces fantômes de la route. « Non seulement c’est important parce qu’à travers nos mémoriaux on peut interpeller la sphère politique pour faire changer les choses, mais surtout, et encore plus, je vois que ces cérémonies apportent soutien et réconfort aux proches. »

Cette implication lui a aussi permis de légèrement se dégêner. « Je prends plus la parole en équipe maintenant. Vraiment pas beaucoup, juste un peu… mais quand même plus qu’avant. »

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